Épisode 1 : Fat quoi ?
L'histoire décrit les aventures de Momser lorsqu'elle débute
dans le monde étrange du patchwork, telles qu'elles sont vues et vécues par son
mari Popser.
Lorsque dans le cours des évènements qui jalonnent une vie humaine, le
facteur apporte un paquet qui contient un livre qui va changer le cours de l’histoire,
il est inutile de s’opposer aux forces du destin.
"Qu’y a-t-il dans le paquet ?" demanda-t-elle. Elle
attendait un exemplaire de "La Machine Créative", éditée et
publiée par Robbie Fanning. Je trouvai la revue dans le paquet, mais elle n’était
pas toute seule. Un large ruban la liait à un livre.
"La Machine Créative", répondis-je. "Et un
livre."
"Quel genre de livre ?"
"Je ne sais pas." dis-je.
"Fais-moi voir," dit ma Chère Épouse. Je lui donnai le livre.
Elle le regarda. Je la regardai. Elle me regarda.
"Un livre sur le quilting," dit-elle. "Pourquoi as-tu
commandé un livre sur le quilting ? Je ne quilte pas,"
"Je sais que tu ne quiltes pas. Je n’ai pas commandé de livre."
"Peut-être que c’est pour toi ?" dit-elle. "As-tu prévu de quilter ?" demanda-t-elle. Elle n’était
pas sérieuse. Elle ne pouvait pas être sérieuse, n’est-ce pas ?
"Je n'ai pas prévu de quilter," dis-je. "Je n'ai même jamais
envisagé de coudre à nouveau. Jamais !" Elle savait tout cela.
J'étais son mari, son âme sœur. Je la soutiendrai toujours pour coudre. Mais
sa chambre de couture était sa vie, et bien que je fusse son âme sœur, il y a
belle lurette que je ne m'occupais plus de mes boutons. Maintenant, je n'aime
même pas utiliser du fil dentaire, de peur de me coudre les dents ensemble,
tant ça ressemble à du fil à coudre.
"Il y a une note", dit-elle. 'Le livre est un cadeau pour moi de
Robbie." Elle me montra le petit mot. Elle me montra le livre :
"Manuel complet du quilting machine".
"Eh bien, voila qui explique tout," dis-je
prudemment.
"C'est un beau livre" dit-elle, "mais je ne quilte pas."
"Eh bien, peut-être pourras-tu le regarder à l'occasion."
"Je n'ai pas le temps de regarder un livre dont je ne me servirai
jamais. Il faut que je finisse la poupée Raggedy Ann, et ensuite j'ai à faire
les deux robes pour les filles." Les filles, ce sont Shira et Rachel, deux
de nos quatre petits-enfants.
"Eh bien, envoie au moins un petit mot de
remerciement."
"Pourquoi dis-tu "Eh bien" tout le temps
?" demanda-t-elle.
"Eh bien, pourquoi pas ?"
"Eh bien, c'est un joli livre," dit-elle. Je
la regardai avec amusement. Ses doigts étaient occupés à feuilleter les pages
du livre. Je la vis pencher la tête, son regard attiré par les pages
colorées. "Mais je n'ai pas le temps de le regarder," dit-elle, et
elle me le tendit.
"Je vais le mettre de côté," dis-je en le
saisissant. Mais elle le reprit.
"C'est un très beau livre. Peut-être que je vais le
regarder, juste une minute."
Et voilà, c'est ainsi que ça a commencé. Cela s'est passé
il y a trois semaines. Aujourd'hui, j'ai envisagé de prendre une seconde
hypothèque sur notre maison. Aujourd'hui, j'ai envisagé d'acheter les stocks
de tous les magasins de patchwork du pays. Aujourd'hui, je lui ai demandé quand
est-ce qu'elle allait de nouveau faire de la couture.
"Quilter c'est coudre," dit-elle.
Trois semaines et deux heures après qu'elle ait reçu le
livre par la poste, elle l'avait lu de la première à la dernière page. Trois
semaines et quatre heures après qu'elle ait reçu le livre nous étions dans le
premier magasin de patchwork. Trois semaines et six heures après qu'elle ait
ouvert le livre nous étions dans un deuxième magasin de patchwork. Trois
semaines et huit heures après qu'elle lu et relu CE LIVRE, elle possédait une
planche à découper OLFA et son premier cutter rotatif.
"Qu'est-ce qu'un fat quarter ?" me demanda-t-elle
cette nuit.
"Fat quoi ?" demandai-je.
"Fat quarter," répéta-t-elle.
Je regardai dans ma poche et en sortis un quarter (une
pièce d'un quart de dollar). J'en examinai les deux faces. "Les
quarters ne sont pas trop gras (en anglais fat = gras)," dis-je.
Quand je me remis du coup dans l'estomac, j'allai devant mon
ordinateur me connecter sur Internet. Je tapai "Quilt" et
l'ordinateur, comme une machine à sous de Las Vegas, vomit plus d'informations
sur le patchwork que je n'aurais voulu en voir. Ma Chère Épouse était aux
anges, euphorique, son sourire était grand comme la chambre, comme la maison,
comme toute la Californie.
"Imprime tout," dit-elle.
"Il n'y a pas assez de papier dans le monde pour tout
imprimer", dis-je.
"Imprime," répéta-t-elle. J'imprimai donc un
dictionnaire des termes du patchwork, et une douzaine de conseils utiles aux
débutants. (Je la soupçonne d'être devenue une quilteuse débutante lorsque
le facteur quitta la poste ce jour maudit).
Demain elle prendra son premier cours de patchwork. Elle a
besoin de cours...pour la discipline. J'ai essayé de lui parler de notre budget
limité, mais son sens des réalités a disparu le jour où le kit "Viking
Quilting" pour sa machine à coudre est arrivé par la poste. Son contact
avec la réalité s'estompa lorsqu'elle regarda la première des cinq cassettes
sur le patchwork qu'elle avait commandées (et c'était avant qu'elle découvre
les émissions "Simply Quilts" et "Quilt in a Day" à la
télévision).
Peut-être qu'un cours lui fera comprendre qu'elle n'a pas
besoin d'une pièce pleine de fat quarters, et d'une boîte pleine de gabarits,
et de 30 bobines de fil à quilter et vingt mètres de tissus assortis et de
toutes les tailles de règles en plastique et les cutters et les épingles de
patchwork et les aiguilles et les rouleaux de molleton et le pied-de-biche à
double entraînement et le pied-de-biche pour le matelassage à main libre pour
sa machine à coudre.
Les piles de carrés et de morceaux de tissu qu'elle a
parfaitement coupés et triés par valeur de couleurs emplit le meuble où nous
avions l'habitude de conserver céréales et farine. Les morceaux de tissu
biscornus, ratés résultants de sa première tentative de coupe au cutter
rotatif sont conservés pour le jour où, comme elle dit "Je ferai un crazy
quilt."
"Tu ne crois pas que tu es en train de devenir folle (crazy
en anglais) avec tout ce patchwork ?" demandai-je alors que je portais
la douzaine de revues de quilting différentes qu'elle m'avait envoyé acheter
ce matin.
"Ce n'est que de la couture," dit-elle. "Et il
n'y a rien de fou à faire de la couture," ajouta-elle en me prenant les
magazines des mains.
"Bien sûr que non," dis-je. Bien sûr que non.
Suis-je bête. Vraiment !
Copyright 1998 by A.B. Silver pour la version originale en anglais.
Toute reproduction est interdite sans la permission de l'auteur.

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